
Le jeune cuisinier surdoué a fait tourner la tête et le cœur du public de Top Chef en 2020. Aussi bouillonnant que ses plats savoureux, le Belge Mallory Gabsi élabore une recette ou un projet à la minute. Nouveau partenaire dans « Cauchemar en cuisine », il a créé des Box repas pour les gourmets à domicile. Rencontre avec celui que tout le monde appelle Malou.
La chance sourit aux audacieux. Et de l’audace et du courage, le jeune Mallory Gabsi en a à revendre. S’il a attrapé le goût de la cuisine au sein de sa famille, il s’est formé auprès des plus grands et notamment de son mentor Yves Mattagne. Chouchou du public lors de la 11e édition de Top Chef suivie par des millions de fans en plein confinement, il a séduit autant par sa créativité que par sa fougue teintée d’humour bon enfant. Le demi-finaliste y nouera de belles amitiés. Au cours d’un juillet torride, il a ouvert une friterie avec le finaliste et autre chouchou, Adrien Cachot.
Victimes de leur succès, ils ont dû renoncer au projet, Covid oblige. Mais le projet verra le jour, c‘est certain. En attendant, pas question de rester les bras croisés. Le jeune homme de 24 ans ne renonce jamais à ses rêves, il l’a prouvé lors de l’accident qui, en 2014, lui a coûté un œil. Que ce soit pour lancer une ligne de vêtements de cuisine en France, rassurer les candidats de « Cauchemar en cuisine » aux côtés de l’impressionnant Philippe Etchebest, préparer un livre de recettes ou proposer, depuis peu, ses Box de repas gastronomiques Mallory at home, le survolté de la fourchette, qui a créé sa société, n’a pas fini de nous étonner.
Votre goût pour la cuisine s’est développé au sein de votre famille. Quand est-ce devenu une passion ?
J’adore la cuisine depuis que je suis tout petit. Je me souviens, le plan de travail n’était pas très haut à la maison mais j’arrivais tout juste à regarder quand mes grands-parents cuisinaient. J’aimais bien manger et j’adorais goûter à de nouvelles saveurs. Quand, à l’adolescence, mes parents m’ont demandé ce que je voulais faire, j’ai choisi la cuisine sans trop réfléchir. Comme je n’aimais pas l’école et que j’étais un enfant plutôt turbulent, c’était plus une obligation qu’autre chose. Mais avec les années et l’expérience des stages, j’ai vraiment commencé à aimer cette discipline.
Je n’étais pas très bon durant les cours mais dès que j’arrivais dans une cuisine, je me transformais et je me donnais à fond. La cuisine permet de canaliser votre énergie car vous vous devez de rester hyper concentré, avec comme seul objectif de contenter ceux qui attendent votre plat. Et pas question que le client attende 40 minutes pour avoir son entrée. Sauf dans « Cauchemar en cuisine » !
Où trouvez-vous votre motivation en étant si jeune ?
Après Top Chef, énormément de gens m’ont envoyé des messages pour me dire que je les inspirais un max, en mettant en avant ma joie de vivre. Le fait d’aimer ce qu’on fait, de savoir pourquoi on se réveille le matin est tellement important. Moi je sais pourquoi et je suis content à l’idée de la journée qui m’attend. Bien sûr, il y a des sacrifices et des choix à faire. Je suis jeune et je dois renoncer à bon nombre de soirées car je travaille tôt le lendemain. Mais les choses sont claires.
J’ai 24 ans : soit je fais la fête aujourd’hui et je ne sais pas où j’en serai dans 10 ans, soit je bosse maintenant et je ferai peut-être la fête dans 10 ans. Attention, j’ai l’âme d’un grand fêtard et je savoure chaque instant. Mais je sais où se situent mes priorités. Je dois dire que mes amis sont une grande source de motivation, ils m’écoutent, me conseillent, me poussent à me dépasser toujours plus. L’important est de rester soi-même, avec ou sans TV. Je garde les pieds sur terre car j’ai encore plein de choses à apprendre.
Avez-vous toujours pu vous appuyer sur un entourage solide ?
Il est essentiel de rester bien entouré. Et je me préserve encore plus depuis Top Chef. La célébrité soudaine attire toujours les loups qui essayent de profiter de votre position et j’en ai repéré pas mal… Quand vous avez tout à coup une multitude de portes qui s’ouvrent, c’est difficile, si jeune, de s’y retrouver. Choisir c’est renoncer. Heureusement, j’ai toujours eu la chance de rencontrer de belles personnes qui m’ont aidé à me construire. Mais cette chance, je l’ai nourrie. Quand j’ai eu mon accident à l’œil, j’aurais pu baisser les bras mais pas question. Je voulais travailler dans des restaurants étoilés, avec un œil ou deux mais c’était ça mon objectif. Et je l’ai fait !
Cette rage de vivre, nous devons tous l’avoir. On ne vit qu’une fois, alors il faut profiter de chaque instant car on ne sait pas de quoi demain sera fait. Si j’ai toujours le sourire c’est justement parce que je profite du moment. Le mode Grincheux je le laisse pour Blanche-Neige ! Nous avons tous nos drames et nos problèmes, j’ai perdu des êtres chers, j’ai eu mon accident mais il faut garder le sourire. Hier c’est hier et demain c’est loin. J’avance, confiant. J’apprends de mes erreurs tout en ne me mettant pas de frein.

D’où vous vient votre force de caractère ?
Elle vient sans aucun doute de ma maman qui m’a élevé. Mon père a toujours été présent pour moi mais il habite au Liban. J’ai accepté son choix de vie car je savais que je pouvais compter sur lui. Mais c’est ma maman qui m’a porté au quotidien, sans elle je ne serais pas devenu le Mallory qui se tient devant vous. Lors de cet accident, elle m’a secoué et m’a poussé à bosser, à ne pas abandonner. Ce qui semblait dur à l’époque m’a en fait sauvé et je ne peux que la remercier. Aujourd’hui, c’est à mon tour de l’aider, de l’entourer, de la gâter. Elle nous a élevés seule mon frère et moi et nous n’avons jamais manqué de rien. Quelle fierté désormais de pouvoir lui rendre la pareille. C’est beau hein la famille ?
Top Chef n’était pas votre premier concours. Vous aimez dépasser vos limites ?
Depuis tout petit, j’adore relever des défis. Il suffit qu’on me dise « T’es pas cap » pour foncer. J’ai un côté un peu fou. Durant mes études de cuisine, dès qu’un prof proposait de participer à un concours, je levais la main. Mon premier, je l’ai gagné. Pour Top Chef, c’est un collègue qui m’a inscrit. En fait, l’émission m’avait repéré depuis déjà 2 ans mais je venais de perdre ma grand-mère et je ne me sentais pas prêt. Quand je relève un défi, je ne pense jamais que je suis le meilleur mais je suis toujours confiant en mes capacités. On apprend beaucoup à se mesurer aux autres. Et notamment à se relever quand on se plante. Il ne faut pas avoir honte de ses échecs. Il ne faut jamais arrêter d’avoir des rêves et rêver grand.
Qu’est-ce qui vous anime le plus ? Le besoin de créer ou de partager ?
Cette envie de partage, je la ressens tout le temps. J’aime l’idée de rassembler, que ce soit autour de la table ou ailleurs. Et je compte bien insuffler ce sentiment quand j’aurai mon propre restaurant. L’endroit étoilé où vous vous sentez à la limite gêné de mal tenir vos couverts, très peu pour moi. Un restaurant, il faut que ça vive, que ça bouge. J’imagine un lieu où les gens peuvent se parler, faire connaissance avec les autres tables. Telle est l’essence même du partage.

Vous n’hésitez pas à vous engager auprès de certaines causes comme pour les Amis de l’Institut Bordet ou la Croix-Rouge.
Dès qu’il y a moyen d’aider des gens dans le besoin, je réponds présent. Mettre sa célébrité, grande ou petite, au service des autres reste fondamental. Je suis allé, avec la Croix-Rouge, donner à manger dans la rue à des sans-abris. Et ça vous retourne le cœur quand vous voyez des familles avec des enfants qui ont faim. Bien sûr, je suis très sollicité et je me retrouve obligé d’opérer des choix. Mais c’est terrible de penser au nombre de gens qui, en 2021, n’ont pas de toit.
Quelles sont les valeurs les plus importantes qu’on vous a transmises et que vous aimeriez transmettre à votre tour ?
Le courage et le respect. Le respect commence par soi-même, pour ensuite respecter les autres, notre travail, notre environnement. Un humain se doit d’avoir des valeurs fortes et d’avancer, sans baisser les bras pour un rien. Bien sûr, chacun agit selon sa sensibilité. Mais j’ai appris à relativiser dans la vie, à cerner ce qui est vraiment important et ce qui l’est moins. J’essaye d’être à l’écoute, de comprendre une position contraire à la mienne, même si ce n’est pas toujours facile. Mais s’opposer sans cesse aux gens n’est pas la solution, c’est surtout une grosse perte d’énergie.
Quel est le plat qui a marqué votre enfance ?
Sans hésitation, le couscous ! Mais j’avoue aussi un faible pour les pâtes.
Votre souvenir d’enfance le plus fort ?
J’en ai tellement. Mais si je pouvais revenir en arrière, je revivrais les moments où ma grand-mère venait me chercher à l’école pour ensuite me garder. Je donnerais tout pour revivre cette époque. Elle est partie en 2018, c’est la vie…. Mes souvenirs en famille sont très forts, les vacances, le ski…. La famille est mon socle.
Les 5 objets-clés

La veste de Top Chef
Même si je ne veux pas rester collé toute ma vie à l’image de Top Chef, il est indéniable que ce concours a été un accélérateur incroyable. Quel souvenir ! Pour l’adrénaline, pour les chefs, pour les amitiés, pour la reconnaissance du public… Je pourrai dire à mes enfants : je l’ai fait !

La chaîne
On m’a offert ce collier à ma naissance.

Les deux anneaux
Je les ai pris quand mes parents se sont séparés. Ils sont parfaitement complémentaires au niveau de la taille, ils s’emboîtent. J’aime les avoir avec moi, c’est comme si je faisais le lien.

La médaille
Je l’ai reçue à la mort de ma grand-mère en 2018. Y sont gravées à l’arrière sa date de naissance ainsi que celle de ma mère, et sa date de décès. Je me console en me disant qu’elle a eu une belle vie.

Le smartphone
Ce qui était tout d’abord un outil ludique à mes yeux et devenu un outil de travail. Je l’utilise plus que mon couteau de cuisine. Malheureusement, j’ai perdu toutes mes archives récemment, y compris mes photos de Top Chef. Avec moi c’est tout ou rien, y compris quand je fais une gaffe. Mais bon, on va dire que c’est une nouvelle étape de ma vie qui commence…
Texte: Gilda Benjamin